Critique et joie. — La critique, tant l’exclusive
et l’injuste, que l’intelligente, fait à celui qui l’exerce
un plaisir tel que le monde doit de la reconnaissance
à toute œuvre, tout acte qui provoquent
beaucoup de critiques de la part de nombreuses personnes :
car la critique laisse sur son sillage une
traînée étincelante de joie, d’esprit, d’admiration
de soi, de fierté, d’enseignements, de bonnes résolutions. —
Le dieu de la joie créa le mauvais et le
médiocre pour la même raison qui lui fit créer le
bien.
Au delà des limites. — Lorsqu’un artiste
veut être plus qu’un artiste, par exemple le prophète
du réveil moral de son peuple, il finit par
s’enticher — c’est là sa punition — d’un monstre
de sujet moral — et cela fait rire sa muse : car la
jalousie peut aussi rendre méchante cette déesse
au bon cœur. Que l’on songe plutôt à Milton et à
Klopstock.
Œil de verre. — L’inclination du talent vers des sujets, des personnages, des motifs moraux, vers la belle âme de l’œuvre d’art ne provient souvent que d’un œil de verre que se met l’artiste qui manque d’âme : cette substitution produit parfois ce résultat très extraordinaire que cet œil finit par devenir la nature vivante, bien qu’avec un aspect un