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AVANT-PROPOS



I.

Il ne faut parler que lorsque l’on n’a pas le droit de se taire, et ne parler que de ce que l’on a surmonté — tout le reste est bavardage, « littérature », manque de discipline. Mes écrits ne parlent que de mes victoires : j’y suis, « moi », avec tout ce qui m’était contraire, ego ipsissimus, oui même, s’il m’est permis d’employer une expression plus fière, ego ipsissimum. On le devine : j’ai beaucoup de choses — au-dessous de moi… Mais il fallut toujours du temps, de la santé, de l’espace, de la distance jusqu’à ce que naquît en moi le désir d’utiliser, en vue de la connaissance, un fait personnel que j’avais laissé derrière moi, une fatalité que je voulais après coup dévoiler, dépouiller, « représenter » (ou quelle que soit l’expression que l’on veuille employer). Dans ce sens, tous mes écrits, avec une seule exception il est vrai, doivent être antidatés — ils ne parlent toujours que de ce que j’ai derrière moi — : quelques-uns même, comme par exemple les trois premières Considérations inactuelles, remontent plus loin encore, en deçà de la période d’incubation d’un livre publié antérieure-