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HUMAIN, TROP HUMAIN, DEUXIÈME PARTIE

liante. — Au moment où quelqu’un manifeste ouvertement les différences d’opinions qui le séparent d’un célèbre chef de parti ou d’un maître, tout le monde croit qu’il en veut à celui-ci. Mais il arrive que c’est justement à ce moment-là qu’il cesse de lui en vouloir : il ose se présenter à côté de lui et il est débarrassé de la torture occasionnée par la jalousie muette.

61.

Voir luire sa lumière. — Dans un état d’obscurcissement comme la tristesse, la maladie, la contrition il nous est agréable de voir que nous pouvons encore faire de la lumière pour d’autres, et qu’ils perçoivent chez nous une sphère lumineuse produite de la même façon que celle de la lune. Par ce détour nous participons de notre propre faculté d’éclairer.

62.

Joie partagée. — Le serpent qui nous mord croit nous faire du mal et s’en réjouit ; l’animal le pliis bas peut imaginer la douleur d’autrui. Mais imaginer la joie d’autrui et s’en réjouir, c’est là le plus grand privilège des animaux supérieurs, et, parmi ceux-ci, il n’y a que les exemplaires les plus choisis qui y soient accessibles, — c’est-à-dire un humanum rare : en sorte qu’il y a eu des philosophes qui ont nié la joie partagée.

63.

Grossesse ultérieure. — Ceux qui sont parve-