l’on a faite à quelqu’un est beaucoup plus lourde
à porter qu’une injustice que quelqu’un d’autre
vous a faite (non pas précisément pour des raisons
morales, il faut le remarquer —) ; car, au fond,
celui qui agit est toujours celui qui souffre, mais
bien entendu seulement quand il est accessible au
remords ou bien à la certitude que, par son acte, il
aura armé la société contre lui et il se sera lui-même
isolé. C’est pourquoi, abstraction faite de tout ce
que commandent la religion et la morale, on devrait,
rien qu’à cause de son bonheur intérieur,
donc pour ne pas perdre son bien-être, se garder
de commettre une injustice plus encore que d’en
subir une : car, dans ce dernier cas, on a la consolation
de la bonne conscience, de l’espoir de la vengeance,
de la pitié et de l’approbation des hommes
justes, et même de la société tout entière, laquelle
craint les malfaiteurs. — Quelques-uns, et ils ne
sont pas un petit nombre, s’entendent à la ruse
malpropre de transformer toute injustice qu’ils ont
commise en une injustice qui leur a été faite, et à
se réserver, pour excuser ce qu’ils ont fait, le droit
exceptionnel de la légitime défense : pour porter
ainsi plus facilement leur fardeau.
Jalousie, avec ou sans porte-parole. — La jalousie ordinaire a l’habitude de caqueter dès que la poule enviée a pondu un œuf. C’est une façon de se soulager et de se calmer. Mais il existe une jalousie plus profonde encore : dans ce cas, celle-ci ne dira pas un mot et elle souhaitera que l’on ferme la bou-