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LE VOYAGEUR ET SON OMBRE

dans les petites choses n’est pas une sorte de commodité, un faux-fuyant devant les voix secrètes qui conseillent de donner de l’ampleur à la vie. Mais il ne peut plus passer de l’autre côté, — il est trop tard pour cela.

180.

Les maîtres à l’époque des livres. — L’éducation particulière et l’éducation par petits groupes se généralisant de plus en plus, on peut presque se passer de l’éducateur, tel qu’il existe maintenant. Des amis avides de savoir, qui veulent ensemble s’approprier une connaissance, trouvent, à l’époque des livres, une voie plus simple et plus naturelle que l’« école » et le « maître ».

181.

La vanité considérée comme la chose la plus utile. — Primitivement l’individu fort traite, non seulement la nature, mais encore la société et les individus faibles comme des objets de proie : il les exploite tant qu’il peut, puis il continue son chemin. Parce qu’il vit dans l’incertitude, alternant entre la faim et l’abondance, il tue plus de bêtes qu’il ne peut en consommer, pille et maltraite plus d’hommes qu’il ne serait nécessaire. Sa manifestation de puissance est en même temps une expression de vengeance contre son état de misère et de crainte : il veut, en outre, passer pour plus puissant qu’il n’est, voilà pourquoi il abuse des occasions : le surcroît de crainte qu’il engendre est pour lui un surcroît de puissance. Il remarque à temps que ce