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OPINIONS ET SENTENCES MÊLÉES

Allemands du Sud par leur penchant à l’indolence. — Il lui semblait que les hommes allemands avaient dans leurs femmes des ménagères maladroites, mais très convaincues de leur valeur ; que celles-ci disaient du bien d’elles-mêmes avec tant d’insistance qu’elles avaient convaincu presque tout le monde et, en tous les cas leurs maris, des vertus particulières que déploient dans leur intérieur les femmes allemandes. — Quand alors la conversation se portait sur la politique de l’Allemagne à l’extérieur et à l’intérieur, il avait l’habitude de raconter — il disait de révéler — que le plus grand homme d’État de l’Allemagne ne croyait pas aux grands hommes d’État. — Il considérait l’avenir des Allemands comme menacé et menaçant : car ils avaient désappris de se réjouir (ce à quoi les Italiens s’entendaient si bien), mais, par le grand jeu de hasard des guerres et révolutions dynastiques, ils s’étaient habitués à l’émotion, par conséquent, ils finiraient, un jour, par avoir chez eux l’émeute. Car c’est là la plus forte émotion qu’un peuple puisse se procurer. — Le socialiste allemand, disait-il, était le plus dangereux de tous parce qu’il n’étaitpas poussé par une nécessité déterminée ; ce dont il souffre c’est dene pas savoir ce qu’il veut. Quoi qu’il puisse donc atteindre, dans la jouissance il languira toujours de désir, tout comme Faust, mais probablement comme un Faust très populacier. « Car, s’écriait-il enfin, Bismarck a chassé le démon de Faust qui a tant tourmenté les Allemands cultivés : mais ce démon est maintenant entré dans les pourceaux et il est pire que jamais. »