hélas ! de suivre ce chemin, d’une santé de demain
et d’après-demain, prédestinés et victorieux comme
vous l’êtes, vainqueurs du temps, vous les mieux
portants et les plus forts, vous autres bons Européens ! ——
— Qu’il me soit permis, pour finir, de résumer
encore dans une formule mon opposition contre le
pessimisme romantique, c’est-à-dire le pessimisme
des indigents, des mal-venus, des vaincus : il existe
une volonté du tragique et du pessimisme qui est
un signe de sévérité tout autant que de vigueur intellectuelle
(goût, sentiment, conscience). Avec cette
volonté au cœur on ne craint pas ce qu’il y a de
redoutable et de problématique dans toute espèce
d’existence ; on y recherche même ces qualités.
Derrière une pareille volonté il y a le courage, la
fierté, le désir d’un grand ennemi. Ce fut là d’abord
ma perspective pessimiste, — une nouvelle
perspective, comme il me semble ? une perspective
qui, aujourd’hui encore, est nouvelle et étrange ?
Jusqu’à présent, je m’en tiens à elle, et, si l’on
veut m’en croire, tant pour moi que (à l’occasion
du moins) contre moi… Voulez-vous que cela soit
démontré ? Mais quoi encore, si ce n’est cela, aurait
été démontré dans cette longue préface ?
- Sils-Maria, Engadine supérieure.