Page:Nietzsche - Humain, trop humain (1ère partie).djvu/379

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
379
HUMAIN, TROP HUMAIN

une quantité d’effet s des plus étonnants qui ne pourront plus se réaliser, et le monde en sera appauvri. Il faut qu’elle disparaisse, car son fondement disparaît : la foi en l’autorité absolue, en la vérité définitive ; même dans les États militaires, la contrainte physique ne suffit pas à la produire, mais il y faut l’adoration du caractère princier comme de quelque chose de surhumain. — Dans un état de liberté plus grande, on ne se subordonne que sous conditions, par suite d’un contrat réciproque, partant sous toutes réserves de l’intérêt personnel.

442.

Armées nationales. — Le plus grand inconvénient des armées nationales tant vantées de nos jou s consiste dans le gaspillage d’hommes de la civilisation la plus éminente ; ce n’est que par l’heureux accord de toutes les circonstances qu’il y a de ces hommes, — avec quelle économie et quelle réserve on devrait s’en priver, puisqu’il faut tant de temps pour créer les conditions favorables à la production de cerveaux d’organisation si délicate ! Mais de même que les Grecs sévissaient, sur le sang grec, de même aujourd’hui les Européens sur le sang européen : et le fait est que c’est relativement toujours les mieux cultivés qui sont le plus sacrifiés, ceux qui garantissent une postérité riche et excellente : en effet ils sont au premier rang dans la lutte, chargés du commandement, et de plus ce