Page:Nietzsche - Humain, trop humain (1ère partie).djvu/249

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.




CHAPITRE V


CARACTÈRES DE HAUTE ET BASSE CIVILISATION



224.

Ennoblissement par dégénérescence. — On peut apprendre de l’histoire que la lignée d’un peuple qui se conserve le mieux, c’est celle où la plupart des hommes ont un vif sentiment commun, par suite de l’identité de leurs principes essentiels accoutumés et indiscutables, conséquemment par suite de leur croyance commune. C’est là que se fortifient les bonnes et honnêtes mœurs, là que l’on apprend la subordination de l’individu, que le caractère reçoit d’abord la fixité rien que par ses attaches et l’accroît ensuite constamment par éducation. Le danger de ces communautés, fondées sur des individus caractéristiques d’une même sorte, est l’abêtissement peu à peu accru par hérédité, lequel suit d’ailleurs toujours la stabilité ainsi que son ombre. Ce sont les individus plus indépendants, moins sûrs et moralement plus faibles, de qui dépend, dans de pareilles communautés, le progrès intellectuel ; ce