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HUMAIN, TROP HUMAIN


vieux maîtres possédaient une finesse d’oreille depuis longtemps perdue. Celui qui jadis apprenait à bien écrire dans une langue moderne le devait à cet exercice (aujourd’hui on doit, faute de mieux, se mettre à l’école des vieux Français). Mais il y a plus : il acquérait une conception de la grandeur et de la difficulté de la forme, et d’avance était préparé à l’art en général par la seule véritable voie, par la pratique.

204.

L’obscur et le trop clair l’un à côté de l’autre. — Des écrivains qui ne savent en général donner aucune clarté à leurs idées choisiront de préférence dans le détail les désignations et les superlatifs les plus forts, les plus exagérés ; de là naît un effet de lumière pareil à un éclairage de torches dans les sentiers embrouillés d’une forêt.

205.

Peinture littéraire. — Un objet important aura sa représentation la meilleure quand on tirera comme un chimiste les couleurs du tableau de l’objet lui-même et qu’alors on les emploiera comme un artiste : en sorte que l’on fera naître le dessin des limitations et des transitions des couleurs. Ainsi le tableau acquerra quelque chose de