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HUMAIN, TROP HUMAIN


larmes, notre cœur de désir. — Que désirons-nous donc à l’aspect de la beauté ? C’est d’être beaux : nous nous figurons que beaucoup de bonheur y est attaché. — Mais c’est une erreur.

150.

Vivification de l’art. — L’art relève la tête quand les religions perdent du terrain. Il recueille une foule de sentiments et de tendances produites par la religion, il les prend à cœur et devient alors lui-même plus profond, plus rempli d’âme, au point qu’il peut communiquer l’élévation et l’enthousiasme, chose qu’auparavant il ne pouvait pas encore. Le trésor de sentiment religieux grossi en torrent déborde toujours de nouveau et veut conquérir de nouveaux royaumes ; mais le progrès des lumières a ébranlé les dogmes de la religion et inspiré une défiance fondamentale : alors le sentiment, chassé par les lumières de la sphère religieuse, se jette dans l’art ; en quelques cas aussi dans la vie politique, voire même directement dans la science. Partout où dans les efforts humains on aperçoit une coloration supérieure plus sombre, on peut conjecturer que la crainte des esprits, le parfum de l’encens et les ombres de l’Église y sont restés attachés.

151.

Par quoi le mètre donne de la beauté. — Le