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HUMAIN, TROP HUMAIN


pas avancer d’un pas dans le pays de la certitude. — On croit involontairement que les parties d’une philosophie qui portent un coloris de religion sont mieux prouvées que les autres ; mais c’est au fond le contraire, on a seulement l’intime désir qu’il puisse en être ainsi, partant que ce qui rend heureux soit aussi le vrai. Ce désir nous conduit à acheter de mauvaises raisons pour de bonnes.

132.

Du besoin de rédemption chrétien. — Par un examen attentif, il doit être possible de trouver au phénomène de l’âme d’un chrétien qu’on appelle le besoin de rédemption, une explication qui soit libre de mythologie : par conséquent purement psychologique. Jusqu’ici, à la vérité, les explications psychologiques des états et des phénomènes religieux ont été dans quelque décri, parce qu’une théologie soi-disant libre menait sur ce domaine son existence stérile : car il y avait chez elle à l’avance, comme on peut le conjecturer d’après l’esprit de son fondateur, Schleiermacher, le dessein arrêté de maintenir la religion chrétienne et de faire subsister la théologie chrétienne ; laquelle, disait-on, devait gagner aux analyses psychologiques des « faits » religieux un nouveau fond et avant tout une nouvelle occupation. Sans nous laisser égarer par de pareils devanciers, nous hasardons l’explication suivante