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qu’il s’assied à sa table de travail pour écrire, il prend une expression comme s’il voulait faire faire son portrait ; tantôt il imite le visage de Lessing tantôt celui de Voltaire. Quand nous lisons son éloge de la manière de Voltaire (p. 217, Voltaire), il nous semble l’entendre s’adresser à la conscience de l’époque, pour lui reprocher d’ignorer encore ce qu’est pour elle le Voltaire moderne : « Aussi les qualités sont-elles partout les mêmes, dit-il : une simplicité naturelle ; une clarté transparente, une mobilité vivante, une grâce aimable. La chaleur et la vigueur ne manquent pas non plus lorsqu’elles sont nécessaires. L’aversion contre la boursouflure et l’affectation, chez Voltaire, venait du fond de la nature intime, de même que, d’autre part, quand parfois la malice ou les passions abaissaient son mode d’expression jusqu’à la vulgarité, la faute n’en était pas au styliste, mais à l’homme qu’il y avait en lui. » D’après ce passage, Strauss semble savoir fort bien ce qui en est de la simplicité du style. Celle-ci fut toujours la marque du génie, lequel possède seul le privilège de s’exprimer d’une façon simple, naturelle et avec naïveté. Ce n’est donc pas l’ambition la plus vulgaire qui fait choisir à un auteur la manière simple ; car, bien qu’il y ait des gens qui s’aperçoivent de ce pour quoi un pareil auteur veut se faire passer, il y en a pourtant d’assez complaisants pour le tenir pour tel. Mais l’auteur génial ne se révèle pas