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l’exemple de ces institutions, et ne doute pas un seul instant que, par leur moyen, les Allemands sont devenus le peuple le plus cultivé de la terre et le plus capable de jugements. La culture philistine a foi en elle-même et croit par conséquent aussi aux méthodes et aux moyens qu’elle tient à sa disposition. En second lieu, elle fait des savants les juges suprêmes pour toutes les questions du goût et de la culture et elle se considère elle-même comme le compendium, sans cesse complété, des opinions savantes au sujet de l’art, de la littérature et de la philosophie. Son souci c’est de pousser le savant à manifester ses opinions et de les ingurgiter, par la suite, mêlées, diluées ou systématisées, en guise de cordial, au peuple allemand. Ce qui naît en dehors de ce cercle est écouté avec méfiance et distraction, à moins qu’on ne le néglige complètement, jusqu’à ce qu’une voix finisse par se faire entendre, une voix quelle qu’elle soit, pourvu qu’elle porte la marque de l’espèce savante, et qu’elle sorte des murs de ce temple où réside la traditionnelle infaillibilité du goût. Dès lors l’opinion publique possède une opinion de plus et elle répète d’un écho centuplé le son de la voix qui a parlé. Eu réalité, l’infaillibilité esthétique qui sort de ces murs, par la voix de ces individus, est très incertaine, si incertaine que l’on peut être persuadé du mauvais goût, du manque d’idées et de la grossièreté esthétique d’un savant, tant qu’il n’aura