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avait simplement mal entendu. Il est vrai que Strauss prétendit qu’il fallait être de sens obtus, pour ne pas comprendre que les simples paroles, relatives à Lessing (au paragraphe 90), venaient du cœur. Je ne songe nullement à mettre en doute cette chaleur. Au contraire, s’adressant à Lessing, de la part de Strauss, elle m’a toujours paru être sujette à caution. Cette même chaleur suspecte à l’adresse de Lessing, je la retrouve, poussée jusqu’à l’ébullition, chez Gervinus. Somme toute, il n’y a pas de grand écrivain allemand qui soit plus populaire chez les petits écrivains allemands que Lessing. Et pourtant, je me garderai bien d’avoir de la reconnaissance à l’égard de ceux-ci ; car, que louent-ils en somme chez Lessing ? D’une part son universalité : il est critique et poète, archéologue et philosophe, dramaturge et théologien ; d’autre part, « cette unité de l’écrivain et de l’homme, du cerveau et du cœur ». Ce dernier trait de caractère distingue tous les grands écrivains et parfois aussi les petits et au fond le cerveau étroit s’accorde terriblement bien avec le cœur étroit. Et le premier trait de caractère, cette universalité, n’est nullement une distinction, surtout parce que, dans le cas de Lessing, elle fut amenée par la nécessité. Bien plus, ce qu’il y a justement de singulier chez ces admirateurs de Lessing, c’est qu’ils ne portent pas leur regard sur cette misère dévorante qui poursuivit Lessing durant toute sa