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la garde du grand harem universel de l’histoire, une génération d’eunuques serait-elle nécessaire ? Il est vrai qu’à ceux-là le visage de l’objectivité pure siérait à merveille. On pourrait presque croire qu’il existe une tâche qui consiste à garder l’histoire, afin que rien n’en pénètre au-dehors que précisément des histoires, mais, à aucun prix, des événements, une tâche qui consiste à empêcher que, par l’histoire, les personnalités deviennent « libres », c’est-à-dire véridiques envers elles-mêmes, véridiques à l’égard des autres, en parole et en action. Grâce à cette véracité seulement la peine, la misère intérieure de l’homme moderne viendront au jour, et, en lieu et place de cette convention et de cette mascarade craintives et honteuses, pourront venir les véritables auxiliaires, l’art et la religion, qui, d’un commun accord, implanteront une culture correspondant à des besoins véritables, non point pareille à l’instruction générale actuelle, laquelle enseigne seulement à se mentir à soi-même au sujet de ces besoins et qui par là devient un véritable mensonge ambulant.

À une époque qui souffre des excès de l’instruction générale, dans quelle situation monstrueuse, artificielle et en tous les cas indigne d’elle-même, se trouve la plus véridique de toutes les sciences, cette divinité honnête et nue, la philosophie ! Dans un pareil monde d’uniformité extérieure et forcée, elle reste le monologue savant du promeneur solitaire,