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de gens l’occasion de glorifier le courant susdit. Pour ma part, cependant, je gagne quelque chose qui m’est encore plus précieux que les convenances, c’est d’être instruit et éclairé publiquement au sujet de notre époque.

Inactuelle, cette considération l’est encore parce que j’essaie d’interpréter comme un mal, une infirmité et un vice, quelque chose dont notre époque est fière à juste titre — sa culture historique —, parce que je crois même que nous souffrons tous d’une consomption historique et que nous devrions tous reconnaître qu’il en est ainsi. Gœthe a dit à bon droit qu’en même temps que nous cultivons nos vertus nous cultivons aussi nos vices. Chacun sait qu’une vertu hypertrophiée — et le sens historique de notre époque me semble en être une — peut entraîner la chute d’un peuple aussi bien qu’un vice hypertrophié. Qu’on me laisse donc faire ! Je dirai, à mon excuse, que les expériences qui ont provoqué chez moi ces tortures, je les ai faites presque toujours sur moi-même et que c’est seulement par comparaison que je me suis servi des expériences des autres. Étant aussi l’élève des temps anciens, surtout de la Grèce, j’ai acquis sur moi-même, comme enfant de ce temps-ci, les expériences que j’appelle inactuelles. Ceci du moins j’ai le droit de me le concéder à moi-même, de par ma profession de philologue classique. Car je ne sais pas quel but pourrait avoir la philologie classique,