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fait d’être nu ou court-vêtu est-il déjà une preuve ou du moins un indice de la vérité. Le soupçon suffit pour tourner à l’avantage de la vanité qui est celle de l’auteur : Quelqu’un voit quelque chose de nu : comment ! serait-ce la vérité : se dit-il, et il fait une figure plus solennelle qu’il n’a coutume. Mais c’est déjà pour l’auteur un grand avantage que de forcer ses lecteurs à le regarder d’une façon plus solennelle que l’on ne fait généralement pour un auteur quelconque et vêtu davantage. C’est le meilleur chemin pour arriver un jour à être un auteur « classique » : et Strauss nous raconte lui-même « qu’on lui a fait l’honneur non brigué de le considérer comme une sorte de prosateur classique ». Il croit donc avoir atteint son but. Strauss, le génie, court les rues, déguisé en « classique », dans ce costume court-vêtu des déesses, et Strauss, le philistin, veut, à tout prix, pour nous servir des tournures originales de ce génie, « être déclaré en déchéance », ou encore « être mis irrémédiablement à la porte ».

Mais, hélas ! malgré tous les décrets de déchéance, malgré toutes les expulsions, le philistin revient et il revient souvent. Le visage, plié aux rides de Voltaire et de Lessing, revient, de ci de là, à son vieil aspect primitif et honnête ! Hélas ! le masque du génie tombe trop souvent, et jamais le regard du magister n’est plus maussade, jamais ses gestes ne sont plus raides de s’essayer à