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des allusions ; ils sont flattés et ont l’impression d’être, eux aussi, des savants. »

14.

Le manque de caractère intellectuel. — Lorsque Richard Wagner se mit à me parler de la jouissance que lui procurait la communion chrétienne (la sainte Cène protestante), c’en fut fini de ma patience. Il était un grand comédien, mais sans aucun soutien, et son âme était la proie de tous les stupéfiants violents. Il a traversé toutes les évolutions par lesquelles ont passé ces bons Allemands, depuis les jours du Romantisme : Gorge aux Loups et Euryanthe, frisson à la Hoffmann, puis « émancipation de la chair » et soif de Paris ; ensuite le goût du grand opéra, la musique de Meyerbeer et de Bellini, le tribun populaire, plus tard Feuerbach et Hegel (la musique devait sortir de l’ « inconscient » ), puis la Révolution, puis la déception et Schopenhauer, et le rapprochement avec les princes allemands ; puis les hommages rendus à l’empereur, à l’empire et à l’armée et aussi au christianisme (lequel, depuis la dernière guerre et ses nombreux « sacrifices humains », fait de nouveau partie du bon goût en Allemagne), avec des malédictions proférées contre la « science ».

15.

Vers la fin de sa vie, Wagner s’est effacé ; involontairement il avoua qu’il désespérait et qu’il s’affaissait devant le christianisme.

C’est un vaincu, et il est heureux qu’il en soit ainsi, car autrement quelle confusion aurait encore engendré son idéal ! Sa position vis-à-vis du christianisme me décida, en même temps que je me décidai au sujet du schopenhauérisme et du christianisme.

Wagner a tout à fait raison de plier le genou devant tous