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APPENDICE


RÉFLEXIONS SUR RICHARD WAGNER

(janvier 1874)


À quel moment de sa vie Nietzsche a-t-il cessé d’être l’admirateur et le disciple de Richard Wagner ? On sait que l’auteur de Zarathoustra, douze ans après avoir publié Richard Wagner à Bayreuth, opuscule laudatif qui fut salué en 1876 par les adeptes du maître comme l’évangile de la philosophie wagnérienne, lança dans le monde ce pamphlet ironique et sévère, dont le titre seul suffit à indiquer les tendances. Le Cas Wagner suscite la colère du cénacle de Bayreuth. Mais du moins rappela-t-il aux wagnériens que Nietzsche existait encore et que son œuvre était moins négligeable qu’ils avaient prétendu l’affirmer quand parut Humain, trop Humain. « Froissement de vanité », « folie des grandeurs », déclarèrent-ils péremptoirement, sans prendre la peine se s’enquérir des origines d’un sentiment qui, chez Nietzsche, était antérieur au triomphe de Wagner.

Disciple du musicien-poète, à vrai dire, Nietzsche ne le fut jamais et son admiration se tempéra toujours d’importantes réserves que lui dictait sa clairvoyance. Mais, faisant taire ses scrupules, il se donna sans réserve a l’œuvre wagnérienne, parce qu’il y trouvait la possibilité de réaliser ce qui, aux environs de 1870, lui importait plus que toute autre chose, la régénération de la culture allemande. Et enfin, par dessus tout, il aimait Wagner et ne cessa jamais de l’aimer. Le jeune professeur de philologie classique à l’Université