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AURORE

derait Pascal. Et, en effet, les représentants les plus nobles du besoin d’action prouveraient cette assertion : il suffirait de considérer, avec la science et l’expérience d’un aliéniste, bien entendu — que les quatre hommes qui, dans tous les temps, furent les plus assoiffés d’action ont été des épileptiques (j’ai nommé Alexandre, César, Mahomet et Napoléon) : tout comme Byron lui aussi a été affligé de ce mal.

550.

Connaissance et beauté. — Si les hommes réservent toujours leur vénération et leur sentiment de joie pour les œuvres de l’imagination et de l’idée, il ne faut pas s’étonner si, devant l’opposé de l’imagination et de l’idée, ils éprouvent de la froideur et du déplaisir. Le ravissement qui se manifeste au moindre pas en avant, sûr et définitif, que l’on fait dans la connaissance, au point où en est actuellement la science, est fréquent et presque universel. Mais, provisoirement, ceux-là ne l’admettent pas qui se sont habitués à n’être transportés qu’en quittant la réalité, en faisant un bond dans les profondeurs de l’apparence. Ceux-ci croient que la réalité est laide : ils ne songent pas que la connaissance de la réalité même la plus laide est belle cependant, et que celui qui connaît souvent et beaucoup finit par être très éloigné de trouver laid l’ensemble de la réalité qui lui a procuré tant de bonheur. Il y a-til donc quelque chose qui est « beau en soi » ? Le bonheur de ceux qui connaissent augmente la beauté du monde et ensoleille tout ce qui est ; la connais-