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AINSI PARLAIT ZARATHOUSTRA

Tu dois créer un corps d’essence supérieure, un premier mouvement, une roue qui roule sur elle-même, — tu dois créer un créateur.

Mariage : c’est ainsi que j’appelle la volonté à deux de créer l’unique qui est plus que ceux qui l’ont créé. Respect mutuel, c’est là le mariage, respect de ceux qui veulent d’une telle volonté.

Que ceci soit le sens et la vérité de ton mariage. Mais ce que les inutiles appellent mariage, la foule des superflus ! — comment appellerai-je cela ?

Hélas ! cette pauvreté de l’âme à deux ! Hélas ! cette impureté de l’âme à deux ! Hélas, ce misérable contentement à deux !

Mariage, c’est ainsi qu’ils appellent tout cela ; et ils disent que leurs unions ont été scellées dans le ciel.

Eh bien, je n’en veux pas de ce ciel des superflus ! Non, je n’en veux pas de ces bêtes empêtrées dans le filet céleste !

Loin de moi aussi le Dieu qui vient en boitant pour bénir ce qu’il n’a pas uni !

Ne riez pas de pareils mariages ! Quel est l’enfant qui n’aurait pas raison de pleurer sur ses parents ?

Cet homme me semblait respectable et mûr pour saisir le sens de la terre : mais lorsque je vis sa femme, la terre me sembla une demeure pour les insensés.

Oui, je voudrais que la terre fût secouée de convulsions quand je vois un saint s’accoupler à une oie.