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AINSI PARLAIT ZARATHOUSTRA

L’accomplisseur meurt de sa mort, victorieux, entouré de ceux qui espèrent et qui promettent.

C’est ainsi qu’il faudrait apprendre à mourir ; et il ne devrait pas y avoir de fête, sans qu’un tel mourant ne sanctifie les serments des vivants !

Mourir ainsi est la meilleure chose ; mais la seconde est celle-ci : mourir au combat et répandre une grande âme.

Mais haïe tant par le combattant que par le victorieux est votre mort grimaçante qui s’avance en rampant, comme un voleur — et qui pourtant vient en maître.

Je vous fait l’éloge de ma mort, de la mort volontaire, qui me vient puisque je veux.

Et quand voudrais-je ? — Celui qui a un but et un héritier, veut pour but et héritier la mort à temps.

Et, par respect pour le but et l’héritier, il ne suspendra plus de couronnes fanées dans le sanctuaire de la vie.

En vérité, je ne veux pas ressembler aux cordiers : ils tirent leur fils en longueur et vont eux-mêmes toujours en arrière.

Il y en a aussi qui deviennent trop vieux pour leurs vérités et leurs victoires ; une bouche édentée n’a plus droit à toutes les vérités.

Et tous ceux qui cherchent la gloire doivent au bon moment prendre congé de l’honneur, et exercer l’art difficile de s’en aller à temps.

Il faut cesser de se faire manger, au moment où