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« Zarathoustra vit-il encore ? Il ne vaut plus la peine de vivre. Tout est égal, tout est en vain : à moins que — nous ne vivions avec Zarathoustra ! »

« Pourquoi ne vient-il pas, celui qui s’est annoncé si longtemps ? ainsi demande un grand nombre ; la solitude l’a-t-elle dévoré ? Ou bien est-ce nous qui devons venir auprès de lui ? »

Maintenant il arrive que la solitude elle-même devient tendre et se brise, semblable à une tombe qui se brise et qui ne peut plus tenir ses morts. Partout on voit des ressuscités.

Maintenant, les vagues montent et montent autour de ta montagne, ô Zarathoustra. Et malgré l’élévation de ta hauteur, il faut que beaucoup montent auprès de toi ; ta barque ne doit plus rester longtemps à l’abri.

Et que nous soyons venus vers ta caverne, nous autres qui désespérions et qui déjà ne désespérons plus : ce n’est qu’un signe et un présage qu’il y en a de meilleurs que nous en route, —

car il est lui-même en route vers toi, le dernier reste de Dieu parmi les hommes ; c’est-à-dire : tous les hommes du grand désir, du grand dégoût, de la grande satiété,

— tous ceux qui ne veulent vivre sans pouvoir de nouveau apprendre à espérer — apprendre de toi, ô Zarathoustra, le grand espoir ! »

Ainsi parlait le roi de droite en saisissant la main de Zarathoustra pour l’embrasser ; mais Zarathoustra se défendit de sa vénération et se recula effrayé, silencieux, et fuyant soudain comme dans le lointain. Mais, après peu d’instants, il fut de nouveau de retour auprès de ses hôtes et, les regardant avec des yeux clairs et scrutateurs, il dit :