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monde se remplit des orages de notre vengeance » — ainsi les tarentules parlent entre elles.

« Nous voulons exercer notre vengeance sur tous ceux qui ne sont pas à notre mesure et les couvrir de nos outrages » — c’est ce que se jurent en leurs cœurs les tarentules.

Et encore : « Volonté d’égalité — ceci même deviendra dorénavant le nom de la vertu ; et nous voulons élever nos cris contre tout ce qui est puissant ! »

Prêtres de l’égalité, la tyrannique folie de votre impuissance réclame à grands cris l’« égalité » : votre plus secrète concupiscence de tyrans se cache derrière des paroles de vertu !

Vanité aigrie, envie contenue, peut-être la vanité et l’envie de vos pères, c’est de vous que sortent ces flammes et ces folies de vengeance.

Ce que le père a tu, le fils le proclame ; et souvent j’ai trouvé révélé par le fils le secret du père.

Ils ressemblent aux enthousiastes ; pourtant ce n’est pas le cœur qui les enthousiasme, — mais la vengeance. Et s’ils deviennent froids et subtils, ce n’est pas l’esprit, mais l’envie, qui les rend froids et subtils.

Leur jalousie les conduit aussi sur le chemin des penseurs ; et ceci est le signe de leur jalousie — ils vont toujours trop loin : si bien qu’il faut enfin que leur fatigue s’endorme dans la neige.

Chacune de leurs plaintes a des accents de vengeance et chacune de leurs louanges a l’air de vouloir faire mal ; et être juges semble pour eux le bonheur.