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ITINÉRAIRE DES CAPTIFS.

révolution, s’équiper de pied en cap, et amener à Titow sa maîtresse, que celui-ci avait laissée dans notre capitale lorsque les Russes en furent chassés. Udom se proposait de nous rattraper en chemin, au bout de deux semaines. Je profitai de cette occasion pour écrire à mon neveu Boryslawski de m’envoyer, par ce moyen, quelques chemises et habits, ainsi qu’un écrin avec mes antiques et 200 ducats en or qui se trouvaient dans ma cassette. Udom n’ayant pas pu nous rejoindre aussitôt qu’il espérait, nous fûmes livrés, en attendant et sans merci, à tous les caprices et à toutes les violences de Titow. Fersen, en nous remettant entre ses mains, lui fit compter 1000 ducats pour nos frais de voyage ; mais tout le temps que nous voyagions en Pologne, il ne payait jamais rien ; et entrés dans les provinces démembrées par la Russie, à chaque poste, à chaque gîte, c’étaient de nouvelles querelles et de nouveaux combats ; à peine finissait-il par solder la moitié de notre dépense, tandis que tout ce dont nous avions besoin se trouvait couché sur ses comptes, et à un prix exorbitant. Voilà de quelle manière les officiers russes satisfont leur cupidité. Titow, sans aucune pudeur, nous disait fréquemment qu’il se faisait un petit fonds d’épargne sur notre nécessaire, pour s’en donner bientôt avec ses maîtresses. Non loin de Brody, encore en pré-