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ÉLARGISSEMENT.

en vie, avaient encore à garder ici une impératrice morte et le corps d’un empereur étranglé il y avait trente-quatre ans.

Paul Ier le jour même de son avènement au trône, ne pouvant plus venger la mort de son père, Pierre III, voulut du moins réparer les insultes faites à sa mémoire. On savait que cet empereur, après sa fin tragique, avait été mesquinement enterré dans l’église de Saint-Alexandre-Newski ; Paul Ier s’y rendit aussitôt, suivi de Bezborodko et d’un seul aide de camp. Il ne se trouva qu’un seul moine qui connût l’endroit où le corps avait été déposé. Paul descend avec lui dans le caveau ; fait ouvrir le cercueil, et n’y aperçoit plus que des cendres et quelques restes d’uniforme, de boutons et de bottes. Ému jusqu’aux larmes, l’empereur ordonna d’élever tout de suite dans la même église, un lit de parade pareil à celui de sa mère, nomma les officiers de sa cour pour y faire le service comme au palais ; puis, deux fois par jour, matin et soir, il allait, selon la phrase adoptée, adorer les défunts, en s’inclinant respectueusement par trois fois devant eux et en baisant la main de sa mère. L’impératrice, les princes et princesses, les courtisans, et après eux toutes les personnes décemment vêtues, étaient admises au même honneur. On pratiquait la même cérémonie auprès du cercueil de Catherine,