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ÉLARGISSEMENT.

soir, entra dans ma chambre tout rayonnant de joie et plus qu’à moitié ivre ; il me dit que ce jour même, l’empereur était venu en personne chez le général, pour lui annoncer qu’il était libre, ainsi que tous les autres prisonniers polonais ; qu’il y avait eu une grande fête à la cuisine, que tout le monde s’y régalait et qu’on l’avait régalé aussi. Il me raconta les circonstances de cette visite, mais à sa manière, c’est-à-dire que je n’en compris pas la moitié ; j’y démêlai seulement que les ministres s’étaient d’abord opposés à l’élargissement du maréchal Potocki et au mien, mais que l’empereur décida en maître, et voulut que nous fussions tous libres. Ma joie était extrême ; je n’avais pas besoin de donner à boire à mon ami Makar, car il n’avait déjà que trop bu, mais je lui fis présent d’une chemise et d’un mouchoir.

Le lendemain, lundi, 28, rien de nouveau. Mardi, on m’apprit que le général Kosciuszko était sorti en voiture, qu’il avait eu une audience chez l’empereur, que ma liberté était décidée et que je sortirais de suite. Cependant mercredi se passa, et personne ne venait pour me délivrer ; et tout en attribuant ces délais aux embarras, à la multiplicité des affaires de tous les employés sous le nouveau règne, je n’étais pas tout à fait sans inquiétude, lorsque jeudi au soir, 1er  décembre, au moment où, selon ma coutume, je me promenais