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vie de prison.

livre, ne sachant pas déchiffrer ce qui y était écrit, je l’envoyai chez Alexandre Siemianowicz , inspecteur de la prison, qui, de nouveau trouvant la phrase écrite inintelligible, le porta chez le procureur général Samoilow, qui n’y entendit guère davantage ; ce qui augmenta ses soupçons. » Bref, le livre passa par les mains de différents grands personnages de l’empire, qui tous convinrent que la sentence devait être écrite dans une langue mystérieuse ; et comme à la fin on se souvint que le vieux évêque métropolitain de Pétersbourg était un savant philologue, on lui envoya l’écrit cabalistique ; et ce n’est que lui, enfin, qui prononça l’arrêt définitif en cette circonstance, à savoir, que les mots en question étaient écrits dans une langue connue, et qu’ils ne contenaient rien de dangereux pour l'auguste souveraine de toutes les Russies. Impatient de savoir ce qui avait donc pu intriguer si longtemps les savants et les grands personnages de l’empire, je prends le livre, je l’ouvre ; mais quelle est ma surprise de n’y trouver que ces mots : « Ex libris Stanislai Sokolnicki ! » Pour la première fois depuis que j’étais dans ce cachot, j’ai ri, et cela de bien bon cœur. Et voilà l’empire où, selon Voltaire, les arts et les sciences se sont réfugiés ! Je reviens à mon triste journal.

Pendant longtemp , les livres étaient ma seule