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COMPAGNONS DE CAPTIVITÉ.

genre de vie dans cette captivité, et le petit nombre d’incidents qui y sont arrivés jusqu’à l’époque de mon élargissement.

La Sibérie et le Kamtschatka sont, pour ainsi dire, les deux grandes bastilles de la Russie ; Schlusselbourg, sur le lac Ladoga, est encore une forteresse où l’on enferme les prisonniers pour la vie. C’est là que le malheureux Iwan fut assassiné par les ordres de Catherine. La prison où j’étais incarcéré faisait partie de la citadelle de Pétersbourg, s’appelait secrète, et ne servait ordinairement qu’à détenir les criminels d’État, pendant l’espace de temps de la durée de leur interrogatoire. Je ne sais pas pourquoi on s’était écarté de cette règle en notre faveur, et à mon arrivée je n’y ai trouvé que deux prisonniers. Le plus ancien et celui qui à mon arrivée s’y trouvait déjà depuis deux ans, était Jean-Baptiste Bonneau[1],

  1. Jean-Alexandre de Bonneau, né à Montpellier en 1739, entra fort jeune dans la carrière de la diplomatie. En 1780, il s’établit en Pologne comme chargé d’affaires du prince Xavier de Saxe, fils d’Auguste III, roi de Pologne. Plus tard, il travailla avec activité à l’ouverture du commerce de la Pologne avec la France par la mer Noire, et provoqua, de la part du gouvernement polonais, des mesures favorables à ce projet. Il attira par ce moyen les regards du gouvernement français, de sorte, qu’en 1792, M. Descorches de