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INTERROGATOIRE.

prudence et par la réflexion. Il ont pris, les armes, non comme des rebelles qui les lèvent contre une autorité légitime, mais comme une nation libre, provoquée par des usurpations mille et mille fois réitérées. Il ont succombé, et la grande souveraine, qui sait apprécier les actions nobles, loin de sévir contre un peuple innocent, contre ses défenseurs livrés à sa puissance, ne leur refusera pas, j’en suis sûr, cette compassion et cet intérêt que la vertu malheureuse excite toujours dans un cœur magnanime.

« C’est la vérité, Monsieur le comte, que vous exigez de moi : je vous la dirai donc, quand même elle ne vous serait pas agréable. C’est l’envahissement de la Pologne, c’est la subversion d’une constitution monarchique, mais fondée sur les bases d’une liberté raisonnable, c’est le démembrement de ses plus belles provinces, les exils, les proscriptions, l’oppression jointe à l’insulte, qui ont forcé les Polonais à essayer de se délivrer de tant de maux. Non contents d’avoir enlevé les trois quarts de nos provinces, vous exerciez sur le reste d’un royaume malheureux et mutilé une autorité despotique. Le roi, quoique faible de caractère et dévoué entièrement à vos volontés, n’était cependant pas à l’abri de l’insulte et de la dérision. Dans les élections, c’étaient vos troupes qui choisissaient les députés. La diète aas-