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LA MORT FAIT LE TROTTOIR

un point de rouge à la commissure des paupières, elle exhala sa rancœur :

— Saleté, va !

Ruby, qui fixait son cache-sexe, se fâcha.

— Liliane, je te défends de me parler de cette façon.

Sa partenaire pivota sur la chaise.

— Tu me défends… tu me défends… Non, mais chez qui… Si ça me plaît, je le ferai savoir à tout le monde que tu n’es qu’une traînée.

Ruby passait ses cuisses au blanc-gras. Elle était excédée.

— Tout ça à cause de Tonio, soupira-t-elle. Si tu savais ce que j’en pense.

— Il ne te dégoûtait pas tant que cela…

L’habilleuse buvait du lait. Dès qu’elle le put, elle se sauva, et trottinant dans les couloirs, gagna la vaste pièce où une vingtaine de grandes filles, la plupart complètement nues, en chantonnant vérifiaient leur maquillage devant des miroirs trop petits.

— Il y a du nouveau chez les May Sisters, mes enfants, fit la vieille.

— Raconte vite.

Elle ne se fit pas prier.

Maintenant, de son pas menu, l’habilleuse se hâtait vers le plateau. Elle se glissait jusqu’au manteau d’Arlequin où, près du tableau d’appel, elle trouva le régisseur. En scène le chanteur de charme se pâmait.