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LA MORT FAIT LE TROTTOIR

tre d’Adorata, je fus comme assommé. Je ne savais plus que faire, que penser. Ce qui se passa dans mon âme vous importe au fond fort peu et ce serait vous importuner que vous relater toutes les affres que je traversai. J’ai finalement compris que je ne pouvais pas garder pour moi seul cette série de coïncidences et c’est pourquoi, monsieur, je suis venu vous trouver.

Le visiteur se tut. Neyrac le regardait sans mot dire. Après quelques instants de silence. Neyrac demeurant muet, l’inconnu reprit :

— Je comprends, monsieur, combien bizarre doit vous paraître mon récit et combien suspectes mes déclarations. Je dois vous dire que je n’ai rigoureusement aucune preuve à vous apporter de la véracité de mes dires. La garçonnière que j’habite possède deux entrées, une entrée principale que surveille normalement la concierge, une entrée de service qui donne sur une ruelle. C’est par cette entrée de service que, la nuit, j’entre et je sors. Mon domestique, un boy indochinois, couche au sixième étage. Personne ne peut vous affirmer que je suis rentré chez moi les nuits des crimes. Et d’ailleurs, cela même ne prouverait rien, car j’aurais pu tuer ces trois filles et rentrer ensuite tranquillement. Mais je vous fais observer que rien ne m’obligeait à me présenter à vous et que, si je n’étais venu, vous ne m’auriez jamais connu, vous n’auriez jamais su que j’avais été le dernier amant de ces malheureuses. Il y a là de quoi vous con-