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LA MORT FAIT LE TROTTOIR

— Eh ! dis, tu les as connues, toi, les Sisters ?

— Si je les ai connues… Oh ! là là… bien sûr que je les ai connues. Et comment !

À ce moment, le prote regarda l’heure à l’horloge ronde fixée au-dessus des étagères sur lesquelles s’alignaient les bouteilles d’apéritifs.

— Allez les gars, c’est l’heure, fit-il.

Les typographes vidèrent leurs verres, sortirent.

Alors un petit homme qui jusqu’alors n’avait rien dit, absorbé par le demi de bière qu’il n’en finissait pas de boire, s’approcha de l’homme ivre. Il portait un pull-over sous son veston et un petit nœud papillon à son col. Il était coiffé d’un chapeau melon.

— Alors comme cela, vous les connaissiez, les May Sisters ?

L’homme tituba pour se retourner vers lui.

— Si je les connaissais… Personne, tu entends, personne ne les a connues comme moi. Parce que… non, ça, je ne peux pas le dire…

— Elles étaient jolies, hein ?

— Jolies… C’est rien de le dire… Et faites.

Sa main hésitante esquissa des courbes dans le vide.

— Comme cela… Des vraies statues.

— Une fine, proposa le petit homme.

— Ce ne serait pas poli de refuser.

Les verres remplis, le petit homme leva son verre.

— À votre santé.