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LA MORT FAIT LE TROTTOIR

verre dans un des bars voisins. Et l’on restait jusqu’à l’aube. Les dancings et les boîtes refusaient du monde. Les affaires étaient prospères, mais on n’était pas tranquille. La Mort rôdait par là, la Mort faisait le trottoir.

Dans un petit bar tout en longueur, une fille se lamentait.

— Vous avez vu. C’est dans le journal. Il lui a coupé les seins…

Elle prenait sa gorge dans ses mains.

— J’ai les foies. Je ne veux pas qu’il me les coupe.

— Qu’est-ce que cela peut te fiche, puisqu’il t’aura crevée avant.

— Tais-toi donc. Tu vas me porter la poisse.

Une vieille marmonnait :

— De mon temps, ça n’arrivait pas des choses comme cela. Il y avait une police.

Sous son calme apparent, Neyrac s’énervait. L’enquête piétinait.

C’était Eleanor, la danseuse américaine, qui avait découvert le second crime. Elle s’était prise de pitié pour Liliane dont elle avait deviné le désespoir. Elle n’avait jamais aimé ; la passion farouche dont Liliane avait témoigné pour Tonio l’avait d’autant plus émue. Elle avait voulu faire part à sa voisine de sa compassion, lui offrir son aide. Comme personne ne répondait aux coups qu’elle frappa à la porte, elle s’était décidée à