Page:Nicolaï - La loi du Sud, 1946.djvu/139

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
137
LA DAME DU DÉSERT

dans le sol, les esclaves tirent l’eau qui arrosera la terre et alimentera les bassins.

Comme la terre est trop pauvre pour les nourrir, ils vont faire fortune dans les grandes villes. Ce sont des commerçants fameux, âpres au gain, qui rejettent la civilisation dès qu’ils reviennent chez eux.

Les femmes n’ont pas le droit, sous peine de mort, de quitter la forteresse enchantée des villes mozabites. Jusqu’à quarante ans, elles ne sortent pas, même voilées.

Elles restent, mystérieuses et secrètes, dans leurs maisons sans fenêtres, derrière leurs murs inviolables. Cependant, on les dit belles, modelées dans une chair laiteuse… Fruits savoureux… Fruits défendus.

Gérald, tentant de rejoindre la mosquée de Gardhaïa, s’égara dans les ruelles toutes semblables. À chaque instant, il lui semblait qu’il s’éloignait de son but.

Il avait chaud, une sourde inquiétude l’habitait. Tout à coup, une silhouette brune le frôla.

Il connaissait assez bien l’arabe et s’en servit pour demander son chemin.

Sous le haïk sombre, le visage découvert, une vieille femme ridée et sans charme le dévisagea longuement. Puis, prenant une décision :

— Suivez-moi, dit-elle.

Elle le conduisit dans un dédale de rues où elle évoluait à son aise.

Soudain, elle s’immobilisa. Montrant un chemin à son compagnon, elle fit un signe d’adieu et, se courbant, entra par une porte basse.

Gérald poussa une exclamation.

Ombragée de figuiers, de jasmins, de vigne et de rosiers, un palais ajouré dressait sa masse blanche.

Une gazelle, légère et bondissante, passa, lancée comme une flèche dans l’espace. Et il eut le temps,