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UN HOMME SE VENGEA

— Je n’en puis plus, laissez-moi partir.

Il rit.

— Reprenez-moi, insista-t-elle… Je serai votre esclave… Je ferai ce que vous voudrez.

— Seule la mort d’un de vous peut libérer l’autre.

— Taisez-vous.

La voix du comte s’adoucit.

— Si vous vouliez… Vous seriez libre… Et je vous reprendrais car nulle autre femme ne peut m’émouvoir…

— Que dois-je faire ?

— Il lui tendit un foulard, puis referma le guichet. Bénita resta un moment immobile… Elle ne comprenait pas bien ce qu’il avait voulu dire…

Puis la lumière se fit dans son esprit.

Elle s’approcha d’Antal endormi et noua à son cou le foulard, d’un geste presque tendre… Au moment de serrer, ses mains retombèrent le long de son corps, comme des choses mortes.

Au matin, un cri terrifié réveilla le comte. Il se précipita dans la chambre par une porte secrète qu’il avait aménagée…

Sur le seuil, il s’arrêta, incapable d’avancer : Antal était penché sur le lit de bois précieux où Bénita gisait sans vie.

C’est contre elle qu’elle avait braqué le revolver qu’il avait donné la veille, enveloppé d’un mouchoir.

Le souvenir d’un amour, même mort, avait été plus fort que son désir de liberté.

En tirant, elle avait délivré l’autre.

Et le comte comprit que la vengeance lui échappait puisque la passion de ces deux êtres triomphait de lui.