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ADOLESCENCE

tomba à gauche. La barque pencha… Le cri de Claire fut étouffé par l’eau qui la happait.

Mario revenait à la surface, s’ébrouait, respirait fortement et partait au secours de son amie.

Un remous lui indiqua l’endroit où elle avait disparu. Il plongea, la ramena à l’air.

Elle se débattait furieusement et, s’agrippant à son cou, l’entraîna avec elle.

Il recommença son manège, mais, une fois encore, elle l’emmena au fond de l’eau.

Il perdit son souffle, s’affolait, s’épuisait à cette lutte vaine… Un instant, il pensa à rejoindre la rive, à la laisser… Sa honte lui insuffla une force nouvelle. Il plongea, la ramena d’un bras rude. Elle s’abandonnait.

— Sauvés, nous sommes sauvés, dit-il à haute voix.

La barque dansait mollement, à la dérive. Alors, il repartit vers l’île en nageant lentement d’une seule main, réservant ses forces.

À mesure qu’il avançait, son fardeau se faisait plus incompréhensiblement léger…

Il s’accrocha au vieux ponton de bois où ils avaient débarqués tout à l’heure, remonta à terre, tira Claire près de lui.

Il la regarda.

C’était elle et ce n’était plus elle. Son visage lisse était devenu flou. Elle semblait plus grande, irréelle. Ses yeux grands ouverts semblaient voir des choses qu’ils n’avaient jamais vues.

Une angoisse inconnue le fit tomber à genoux.

— Claire ! Claire ! appela-t-il.

Mais elle ne répondit pas.

Dans la nuit, on trouva, près du cadavre de la jeune fille, le héros adolescent qui, épuisé de fatigue, s’était endormi…