Page:Nicolaï - La loi du Sud, 1946.djvu/106

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
104
LA LOI DU SUD

n’avait rien à lui offrir. Comment la sauver, puisqu’aucun danger ne la menaçait ?

Une coulée pourpre et bleue tombait du ciel sur l’eau. Le rivage, dans le lointain, formait une ligne sombre.

Il fallait rentrer, et rien de ce merveilleux qu’il attendait n’était venu. Rien ne viendrait jamais !

Il eut un éblouissement !

Claire avait dit tout à l’heure qu’elle ne savait pas nager :

S’ils chaviraient, il pourrait la sauver…

Mais pourquoi la barque chavirerait-elle ? Elle était solide et le fleuve paisible.

Son dernier espoir fuyait.

Chavirer… mais pourquoi pas ? Il suffirait d’un geste maladroit pour faire retourner l’embarcation… Il se jetterait à l’eau, la ramènerait à terre… Elle comprendrait alors qu’il était fort et puissant. Et lorsqu’elle aurait compris, il immolerait sa force et deviendrait son esclave.

— Voulez-vous ramer ? demanda-t-il.

— Je m’en tirerais trop mal !

— Je vous conseillerai.

— Comment arriver jusqu’à vous ? J’ai peur de tomber !

— Mais non. Il n’y a aucun danger. Levez-vous lentement, toute droite, bien au milieu de la barque, et venez ici. Quand vous atteindrez ma place, je me lèverai à mon tour.

— Bon. Je vais essayer.

Elle venait à lui, étendant les bras. Quand elle fut arrivée, il se leva brusquement.

Que se passa-t-il ? Il n’avait pas envie, à ce moment, de faire chavirer l’embarcation, mais son idée s’était matérialisée et semblait agir comme en dehors de lui.

Claire se cramponna à sa manche. Il perdit l’équilibre,