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— À ce nom révéré, Gustave laisse Lydie s’échapper de ses bras ; et, se prosternant loin d’elle, il implore sa grâce. Il l’obtient pour prix de son respect, et s’éloigne au désespoir.

        Mais, en brisant les plus aimables nœuds,
    Leurs cœurs toujours unis semblent toujours s’entendre ;
    On ne saura jamais lequel fut le plus tendre
            Ou le plus malheureux.



LXIX


— Partons, me dit Gustave, partons à l’instant même. Tout est-il prêt ?

Je lui rappelai qu’il n’avait commandé ses chevaux que pour minuit.

— Envoie-les chercher, reprit-il avec impatience, je ne veux pas rester un moment de plus ici.

— Qu’est-il donc arrivé ? m’écriai-je ; dans quel trouble vous êtes ?

— Je l’ai revue, Victor ; je l’ai tenue là, sur mon cœur, et il faut la quitter, ne la revoir jamais !… J’en mourrai, j’espère.

Et Gustave s’abandonnait à tout l’excès d’une douleur déchirante.

— Tu le vois, ajouta-t-il, je suis hors d’état de me rendre chez madame Bonaparte. Vas-y toi-même, fais demander ma mère, dis-lui que je suis retenu ici… que je ne puis la rejoindre… que je suis obligé de hâter mon départ… Informe-toi si je n’ai point de nouveaux ordres du général, et reviens sur-le-champ, j’ai besoin de toi… Je suis bien malheureux.

J’obéis, et revins peu de moments après accompagné de madame de Révanne. Elle ne voulait pas laisser partir son fils sans l’embrasser. Je la précédai d’un instant pour dire à Gustave :

— Contraignez-vous, voici votre mère.

Alors il cacha sous d’autres papiers la lettre qu’il écrivait, et se leva pour aller au-devant de madame de Révanne.

— Pour cette fois, lui dit-elle, nos adieux ne seront pas si tristes, le général vient de m’affirmer qu’avant un mois vous