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LA MARQUISE.

Mais vous la pressez trop, son cœur est combattu
Par tous les sentiments qu’un tel projet inspire.
Elle a trop à penser pour avoir rien à dire.

MERVILLE.

Eh ! mais, en pareil cas le silence répond.

LA MARQUISE avec impatience à Merville

Vraiment, par sa bonté votre avis me confond.
Mais pour nous le donner attendez qu’on l’exige.

LE MARQUIS.

Non, en parlant ainsi franchement il m’oblige.
Car malgré son sang-froid, je craignais en secret
Que de ce mariage il n’eût quelque regret.

DELPHINE avec vivacité.

Vous étiez sur ce point dans une erreur bien grande.

LA MARQUISE.

Mais vous en dites là, plus qu’on ne vous demande.

DELPHINE..

Non, madame, et je veux dans ce même moment,
Décider démon sort irrévocablement.
Puisqu’à former ces nœuds ici chacun m’engage,
J’aurais tort de vouloir différer davantage ;
Ainsi mon oncle peut disposer de ma main,
Et pour vous plaire à tous, s’il le faut dès demain,
J’épouserai celui que son choix me destine.
(À part.)
Je l’ai bien mérité, malheureuse Delphine ! (Elle sort en pleurant.)

LE MARQUIS.

Eh bien !…

MERVILLE, à la Marquise.

Eh bien !…Vous l’entendez, je suis au désespoir,
Et je vous jure ici de ne plus la revoir. (Il sort.)

LA MARQUISE.

Ces menaces d’amants ne sont pas fort à craindre ;
Mais allons consoler des deux le plus à plaindre.

(Elle passe dans l’appartement de Delphine.)