Page:Nichault - Un mariage sous l empire.djvu/297

Cette page n’a pas encore été corrigée

d’abord engagée à rejeter la prière d’Albert ; mais l’espoir d’en tirer parti en l’amenant par degré à répondre au sentiment de Natalie l’avait fait consentir à ce qu’elle regardait comme une bonne action. En effet, la dernière lettre lui donnait quelqu’espérance. Albert, convaincu de l’impossibilité de la distraire de son amour pour son infidèle mari, commençait à se résigner à ce rôle d’ami, d’abord si fièrement dédaigné, et l’ennui de vivre loin de toutes ses affections lui rendait plus sensible le besoin de se rapprocher d’elle et de Natalie, enfin, Ermance éprouvait une secrète joie de cette lettre, et cette joie si pure fut cruellement interprétée !

La colère qu’en ressentit Adhémar changea tout à coup sa conduite envers Ermance ; il redevint plus amer dans ses moindres paroles, plus froid, plus dédaigneux qu’il ne l’avait jamais été. Affectant de passer chez la princesse Ranieska tout le temps où il n’était point chez l’empereur, Ermance restait quelquefois une semaine entière sans l’apercevoir. Elle attribuait la cause d’un changement si brusque à l’empire de sa rivale, et se mourait de douleur sans oser proférer une plainte.

M. de Montvilliers seul connaissait l’état de son âme ; elle lui avait écrit son espoir, son bonheur fugitif, elle lui apprit qu’elle le pleurait jour et nuit sans avoir rien fait pour le perdre. Le président, redoutant l’effet d’un chagrin si profond, que nul moment d’épanchement ne venait adoucir, prétexta une violente attaque de goutte pour attirer près de lui sa nièce et lui donner toutes les consolations d’amitié dont elle avait tant besoin.

Ermance saisit avec empressement cette occasion de se soustraire aux preuves quotidiennes d’une ingratitude qui la désolait : d’ailleurs les amis, les gens de la maison commençaient à s’étonner de l’abandon où la laissait Adhémar, du peu de tendresse qu’il témoignait pour Léon, et tout engageait madame de Lorency à mettre fin par son absence à des conjectures qui prenaient chaque jour plus d’extension.

Natalie, inquiète de la tristesse où était retombée son amie, avait obtenu de madame de Volberg la permission d’accom-