mance ; voilà un événement qui prouve pour sa sensibilité.
— Ou plutôt pour l’amour qu’il inspire à sa femme, reprit Adhémar ; il est si facile d’être dévoué quand on est aimé !
Cette réflexion fut accompagnée d’un regard qui fit battre le cœur d’Ermance. Une lueur d’espoir l’éblouit ; mais quand elle chercha à ramener la conversation sur le bonheur dont jouissait l’impératrice, sur l’étoile qui semblait conduire l’empereur à l’accomplissement de tous ses vœux, Adhémar prit un air sombre, et sa préoccupation devint telle qu’il n’entendit plus les questions que lui adressable président. À l’aspect de cette subite impression, Ermance, devinant trop bien les pensées qui devaient l’avoir fait naître, se troubla ; M. de Montvilliers lui-même, dans le secret de leur situation, éprouva de l’embarras, mais il se remit bientôt par l’obligation de recevoir plusieurs personnes qui arrivèrent successivement. Jamais il ne se fit plus de visites matinales que ce jour-là, jamais il n’y eut de joie plus vraie, de prédictions plus fausses qu’à l’occasion de cette auguste naissance. Que de brillantes destinées promises à cet enfant né sur le plus puissant trône de l’Europe, rejeton de la plus vieille dynastie, premier descendant de notre jeune gloire, et baptisé d’un nom qu’envia Jules-César ! Ah ! si jamais il parvient à l’âge de vingt ans, disait-on, nous verrons tous les partis se réunir pour illustrer son règne ; il sera, pour l’antique noblesse de France, le neveu de Marie-Antoinette ; pour la grande armée, le fils du héros ; pour le peuple, l’enfant de la paix ; et pour l’Europe entière, l’héritier d’une gloire qui a retenti dans toutes les parties du monde ! Pauvre science humaine !… Il a vingt ans… et cet enfant, né dans le palais de nos rois, baptisé à Notre-Dame, on l’appelle étranger ! Rome et Paris ne sont point sous ses lois ! et il est dans l’exil !
Quel beau sujet d’humilité, si Bossuet vivait encore !