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Cette réponse rendue fidèlement à madame de Lorency l’avait un peu découragée dans son espérance. Quant à M. de Maizières, elle ne lui en laissait aucune.

— S’il ne l’avait pas aimée du tout, disait-il, nous avions mille chances ; mais dès qu’il l’aime ainsi, il ne l’aimera jamais mieux. J’en suis fâché pour elle, ajouta-t-il, car c’est un homme vraiment distingué ; il m’a presque aussi complètement séduit qu’elle. Il est vrai qu’il se donne assez de peine pour me plaire, et j’ai beau ne pas m’abuser sur l’attrait qu’il trouve à causer avec moi, et le désir qu’il témoigne de former entre nous une liaison d’amitié, je n’y suis pas moins sensible. J’avoue pourtant que j’en serais plus reconnaissant s’il ne trouvait pas toujours moyen de faire tomber sur vous la conversation ; mais on ne doit jamais s’enquérir de ce qui vaut une chose gracieuse, sinon il faudrait sans cesse recourir après ses remercîments. Vous, qui n’avez pas à craindre qu’il vous flatte pour parvenir à une autre, pourquoi ne lui parlez-vous pas de votre jolie protégée ?

— Par la raison que vous venez de dire, répondit Ermance, je suis loin de croire au sentiment que vous prêtez au comte Albert ; mais du moment qu’on en parle et que vous-même en avez l’idée, je ne puis le recevoir chez moi sans me donner aux yeux du monde le tort…

— De le trouver aimable ! interrompit Ferdinand ; voilà un bien grand crime ! Si ce n’est que la crainte des propos qui vous arrête, je vous assure que vous les excitez bien davantage en ne le recevant pas chez vous. On sait que le président aime à le voir, qu’il l’accueille toujours avec plaisir, que vous êtes liée avec sa tante, que sa jeune parente est votre intime amie, et l’on doit naturellement supposer que vous le verriez tous les jours si vous ne le trouviez pas si dangereux.

— J’aime encore mieux cette supposition-là qu’une autre, reprit Ermance ; et, d’ailleurs, je me suis… promis…

— Non, vous ne vous êtes rien promis, dit M. de Maizières en souriant de pitié, mais Adhémar vous a fait promettre de ne pas recevoir le comte Albert, et vous avez la faiblesse de