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était venu prévenir Ermance de la mission que l’empereur donnait à son mari.

Ermance écouta son père sans paraître étonnée, et ne fit pas la moindre réflexion sur un événement qui devait l’affliger : sans quelques larmes qui glissaient lentement sur ses joues décolorées, il aurait pu la croire insensible à cette longue absence d’Adhémar. Un observateur profond aurait deviné la souffrance cachée sous ce calme apparent ; mais M. Brenneval, comme presque tous les gens consacrés aux affaires, réservait toute sa pénétration pour découvrir le plus ou moins de crédit de ceux avec qui il traitait : sur tout le reste, il ne voyait plus que ce qu’on lui montrait. Ermance ne se plaignait jamais de son mari ; elle paraissait l’aimer ; il venait de se dévouer pour elle : M. Brenneval la croyait heureuse, et mettait la tristesse qui l’absorbait quelquefois sur le compte de son caractère, naturellement mélancolique ; d’ailleurs il savait que, dans les ménages d’une certaine classe de la société, la froideur des manières était prescrite par le bon ton, et il pensait que l’intimité n’y perdait rien.

M. Brenneval parlait encore, et s’efforçait de prouver à sa fille les avantages que M. de Lorency recueillerait d’une mission à laquelle l’empereur attachait beaucoup d’importance, lorsqu’Adhémar arriva accompagné de M. de Maizières.

— Eh bien, le voilà qui nous quitte encore, s’écria Ferdinand ; il n’y a pas moyen de former un projet avec ce diable de conquérant ; il n’aime pas plus le repos pour les autres que pour lui. Cependant le voilà bientôt père, à ce qu’on dit, et il serait temps qu’il se tint tranquille.

Ermance attendait qu’Adhémar lui parlât de cette mission : ne sachant comment interpréter son silence à ce sujet, elle leva les yeux sur lui et fut frappée de l’altération de son visage. Un sourire factice essayait vainement de ranimer sa pâleur ; une expression de colère mal dissimulée donnait à sa physionomie quelque chose de celle d’un homme qui rêve une vengeance.

Plusieurs visites survinrent ; on parla de la cérémonie du baptême ; Adhémar évita de répondre aux questions sur cet