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sur le danger d’une inconséquence amusante ; d’ailleurs c’était la tante de M. de Lorency qu’il rendait responsable de cette espièglerie. Le jour fut pris jour la présentation solennelle, et M. Jules de C…, qui avait souvent rencontré madame de Lorency et qui désirait beaucoup la connaître, saisit avec empressement cette occasion d’être reçu chez elle.



XXXIV


À Paris, l’événement le plus important n’occupe pas au delà de trois jours ; c’est la mesure classique de tous les drames qui s’y jouent : aussi les gens qui s’immolent à la vanité d’y produire de l’effet sont-ils toujours dupes. Un suicide, un désastre n’y vivent pas plus longtemps dans le souvenir public qu’une belle action ou un succès.

Excepté les familles que l’incendie du bal plongeait dans le deuil ou l’inquiétude, personne ne pensait plus à ce funeste événement, si ce n’est l’empereur, qui en resta frappé comme d’un avertissement du ciel, et madame de Lorency, que le mystère répandu sur la manière dont elle avait été sauvée préoccupait sans cesse.

Bien qu’on ne parlât plus guère de ce jour malheureux que pour raconter une foule de petits faits plaisants, d’aventures burlesques qui se mêlent ordinairement aux événements les plus tragiques, toutes les invitations de bals avaient été suspendues ; personne n’aurait voulu insulter à la douleur des victimes en donnant un concert, ou même en invitant du monde chez soi dans le dessein de s’amuser : car chez nous le respect des convenances tient lieu de sensibilité ; mais ce sacrifice fait, on tachait de s’en dédommager en se réunissant dans les maisons où l’on était sûr de trouver toujours des causeurs agréables. À cette époque, on comptait plusieurs asiles de ce genre, où l’on pouvait se mettre à l’abri du fracas du monde ou de l’ennui d’un boston de famille. L’habitude d’aller au spectacle ou à la cour ne nuisait en rien à ces réu-