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— De mon temps, dit M. de Montvilliers, on n’employait pas tant de finesse ; la société était divisée en deux classes, celle des femmes coquettes et sages, et celle des femmes galantes et prudes. On savait comment agir et à qui l’on avait affaire : on faisait sa cour aux premières et l’on brusquait les autres. Les arrangements étaient connus, et par cela même assez respectés. La naïveté, la constance de ces sortes de liaisons déconcertaient la calomnie ; chacun portait le poids de sa réputation sans craindre de la voir flétrir ou surcharger par une histoire inventée à plaisir. Enfin, il y avait tant d’indulgence pour les mauvaises mœurs, qu’on laissait en repos ceux qui préféraient la vie honnête, et je ne sois pas trop si cette corruption franche n’est pas moins funeste au bonheur des ménages que les demi-soins qu’on prend aujourd’hui de cacher ses intrigues.

— Comment voulez-vous qu’on fasse sous la domination de notre démon guerrier ? reprit M. de Maizières ; à peine laisse-t-il à ces pauvres officiers le temps de faire une déclaration d’amour ! Ils n’ont pas plutôt obtenu une jolie femme qu’il leur faut la quitter pour aller se battre au bout de l’Europe : cela ne fait pas de longs attachements, et l’on ne peut pas en vouloir aux personnes que ces éclairs d’amour ont un moment éblouies d’en perdre aussitôt le souvenir.

— Tous ces torts sont ceux des maris, répliqua le président ; s’ils ne commençaient pas par délaisser leurs femmes, par les humilier en leur en préférant souvent de moins aimables, ils ne leur donneraient pas, l’idée de se venger.

En ce moment Adhémar lança un regard de mépris sur Ermance, qui la fit rougir ; elle devina que cette réflexion du président semblait une preuve de la confidence qu’elle avait dû lui faire, et des excuses qu’elle espérait trouver dans la conduite de son mari. Le chagrin de ne pouvoir détruire cette impression dans l’esprit d’Adhémar mit le comble à son trouble.

Elle passa le reste de cette journée à chercher l’occasion de lui dire un mot qui dissipât ce soupçon ; mais, chaque fois