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geusement exposée à la colère de son mari pour en connaître le motif. Mais ce supplice, elle l’avait trop pressenti pour ne pas le subir sans murmurer.

— N’irez-vous point voir l’impératrice Joséphine ? dit Adhémar quelques jours après la célébration du mariage impérial. Et madame de Lorency, qui n’attendait que l’autorisation de son mari pour remplir ce devoir, convint avec le général Donavel qu’elle irait prendre sa femme le lendemain, et qu’elles se rendraient toutes deux à la Malmaison.

Il fallait l’extrême désir qu’avait l’impératrice Joséphine de rester le plus près possible de l’empereur, dans l’espérance de le voir quelquefois et d’en avoir chaque jour des nouvelles par les gens de sa cour, pour la déterminer à vivre dans une habitation qui lui rappelait à chaque pas ce qu’elle avait perdu. C’est dans cette charmante retraite qu’elle avait vu Bonaparte heureux de lui consacrer sa gloire ; c’est là qu’il avait adopté ses enfants par amour pour elle. Ce beau parc, ces arbres plantés par lui, ces belles serres où il se plaisait à réunir les plantes les plus rares pour amuser la nouvelle fantaisie de sa femme, ce petit jardin joint par un pont léger à cette bibliothèque, à ce cabinet où son génie décidait des destins de l’Europe, et cette chambre à coucher, la seule de leur appartement commun, tout rappelait à Joséphine son veuvage anticipé : mais lorsque rien ne peut distraire d’un regret on se plait à s’entourer de tout ce qui l’augmente, et l’on conçoit que l’ancienne compagne de Napoléon ait voulu mourir là où il l’avait si tendrement aimée.

Malgré la permission tacite que l’empereur donnait aux personnes de sa cour qui désiraient voir l’impératrice Joséphine, elle recevait peu de visites, car on savait déplaire à Marie-Louise en allant à la Malmaison. Cependant la reine Hortense en faisait les honneurs avec sa grâce accoutumée ; on y donnait de bons concerts, où mesdemoiselles Delieu étaient justement applaudies, on y rencontrait toujours quelques-unes de ces personnes généreuses que le malheur attire, et qui ont par cela même un esprit distingué ; et l’on aurait pu s’y amuser encore sans la roideur de l’étiquette, qui don-