XXIV
Ermance ayant entendu dire à son mari qu’il regrettait de n’avoir pas eu le temps de causer avec le général Donavel des affaires d’Allemagne, s’était empressée de l’engager, ainsi que sa femme, à dîner chez elle le lendemain. M. de Maizières fut consulté sur cette réunion. Madame de Lorency désirait inviter quelques-unes de ces personnes d’élite dont l’esprit et la gaieté font le charme d’un repas. Le chevalier de P…, l’homme qui sait le mieux s’acquitter d’un bon dîner par des récits, des mots charmants, était déjà prié ; M. de Nar…, aux traditions galantes ; le comte de P…, orateur éloquent, habile homme d’Etat, dont la conversation sérieuse ou légère offrait un modèle parfait d’esprit, de raison, d’originalité et de bon goût ; madame de P…, aussi connue par son esprit piquant, par la célébrité de ses amis que par son courage à les sauver dans nos temps de troubles ; la marquise de C…, la Cornuel du temps de l’Empire, et sa nièce, autrefois la duchesse de F…, plus spirituelle à elle seule que toutes celles que l’on citait alors, sans en excepter madame Charles de N…, dont la beauté, les talents et la supériorité presque universelle étaient le désespoir des femmes à prétention ; M. de Chauv…, aussi agréable dans un salon que brillant à la tribune ; le comte de F…, que la Révolution avait fait artiste, et l’Empire un charmant officier, brave, élégant, et assez spirituel pour être plus fier de son beau talent que de son vieux nom ; l’aimable auteur de Pinto ; le célèbre peintre de la bataille d’Austerlitz, madame de Cernan et M. de Maizières devaient compléter cette réunion distinguée. Le mérite de l’avoir choisie ne pouvait échapper à M. de Lorency, et bien qu’il se doutât de la part que sa tante et son ami avaient dans ce choix, il parut surpris de la manière simple et noble dont Ermance fit les honneurs de sa maison à tant de personnes dont la réputation de talent ou d’esprit pouvait l’intimider.
Le soir, il vint plusieurs visites dont quelques-unes servi-