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— Ah ! fiez-vous à moi pour la ramener bien portante ; c’est un préjugé de croire qu’un peu de fatigue soit à craindre pour une femme grosse, cela donne de la force ; je serais vraiment bien malheureuse s’il lui arrivait le plus petit accident. Adhémar me tuerait, j’en suis certaine.

Ici le front d’Ermance se couvrit de rougeur.

— Puisque le grand juge a décidé, poursuivit la comtesse, vous consentez à ce que je vous emmène ; alors il faut envoyer mademoiselle Augustine à Paris, pour dire à Leroy de vous faire un manteau des plus élégants, car c’est la plus gracieuse flatterie à faire à l’empereur.

— Comment, il s’inquiète aussi de vos robes ? dit M. de Montvilliers.

— Vraiment il est la terreur des femmes qui ne peuvent en acheter souvent ? « Vous n’avez donc que celles-là ? » demande-t-il, et Dieu sait dans qu’elle confusion ce peu de mots les jette !

— Je croyais qu’il prêchait l’économie, dit Ferdinand.

— À sa femme, oui, qui n’en tient pas compte, mais non pas aux autres : il prétend qu’il donne assez d’argent aux maris pour qu’ils en mettent aux robes de leurs femmes.

— S’il tient à la parure, l’impératrice sert parfaitement son goût, car elle est toujours habillée avec autant de richesse que d’élégance.

— Sans doute, reprit la comtesse, mais il voudrait que cela lui coûtât moins cher. On sait partout que rien n’est plus ruineux que la parure d’une femme qui commence à vieillir. Celle-là est si préoccupée de la sienne, que la condamner à mort ou au négligé ce serait la même chose ; mais on ne saurait plaisanter, même innocemment sur elle aujourd’hui, car elle fait pitié, et puis elle est si bonne ! si aimable !

— Ce qui me parait le plus douloureux dans sa situation, dit Ermance, c’est l’obligation de sourire toute la journée à des princes étrangers, à des ambassadeurs, à des courtisans qui n’en pénètrent pas moins son secret. En vérité, les philosophes n’en ont pas encore assez écrit sur les tourments des grandeurs. Voyez cette cour si belle, où des souverains